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Les e-mémoires de l'Académie Nationale de Chirurgie

Résultats de la prise en charge de 271 pancréatites aigues sévères

TAIEB M

Séance du mercredi 09 septembre 2020 (Communications libres)

N° de DOI : 10.26299/q1nh-dc30/emem.2019.1.002

Résumé

La pancréatite aiguë (PA) peut être potentiellement grave dans 20 à 30 % des cas accompagnées de complications systémiques multiples et locales, précoces ou tardives. Dans sa forme nécrosante, elle peut se compliquer d’infection de nécrose, complication redoutable grevée d’une lourde morbi-mortalité. Sa prise en charge est fonction de la gravité de la PA, évaluée par le score du Syndrome de Réponse Inflammatoire Systémique (SIRS) et par la présence de défaillances d’organes. Le traitement est principalement symptomatique en dehors de la PA biliaire, étiologie la plus fréquente avec une cholécystectomie et désobstruction des voies biliaires. La mortalité des PA sévères (PAS) peut atteindre jusqu'à 50 %. L’Infection de Nécrose Pancréatique (INP) est le facteur pronostique principal de l'évolution de la PA. Son traitement est devenu plus conservateur et moins invasif, mais il existe peu de données d'études prospectives pour confirmer l'efficacité de ce changement.
Objectifs : le but de l’étude est de fournir des données épidémiologiques, évolutives (morbi-mortalité) et le devenir à long terme de 271 patients présentant une PAS.
Patients et méthode : il s’agit d’une étude longitudinale mono centrique de patients présentant une PAS admis entre Janvier 2010 et Décembre 2019 avec un recueil standardisé prospectif des données cliniques, biologiques, morphologiques, et évolutives de 271 patients présentant une PAS (la sévérité est définie selon les critères d’Atlanta 2012) avec pour principaux paramètres d’évaluation : la morbi mortalité, la durée du séjour hospitalier. L’analyse statistique a été réalisée avec le logiciel SPSS et R 3.4.1
Résultats : notre travail a porté sur 271 patients. L’âge moyen de nos malades est de 51,4 ans avec une prédominance féminine à 72 %. Le statut clinique comptait un SIRS moyen de 3,048, un IMC de 26,31, la pression intra abdominale (PIA) à 15,5 mm Hg. L’indice de sévérité tomodensitométrique moyen est évalué à 7,8. Une co morbidité a été retrouvée chez 46,12 % de nos patients. L’étiologie biliaire représentait 55,9 % des cas, la PA idiopathique ; 21.85 % et alcoolique ; 9,63 %. La cholécystectomie a été possible dans 78,14 % des cas, avec un taux de conversion moyen de 38.14 %. Le nombre d’organes en défaillance et la durée de l’insuffisance d’organes étaient de bons indices pronostiques de mortalité. Le taux d’infection nécrose pancréatique (INP) était de 18,45 %, avec une mortalité de 34 % et un risque majoré de survenue de diabète à long terme. L’antibioprophylaxie a été instituée chez 23, 61 % des patients, sans aucune incidence sur la survenue d’INP et la mortalité. La durée d’hospitalisation était de 28 jours en moyenne, avec des extrêmes de 25 à 264 jours. La morbidité et la mortalité globale était respectivement de 45.01 % et de 29,15 %.
Conclusions : la standardisation de la prise en charge de la PA, après identification de l’étiologie et évaluation précoce de la sévérité, pourrait permettre une gestion optimale de la maladie, et prévenir son évolution. La contribution multidisciplinaire est capitale pour gérer les comorbidités, les défaillances systémiques, les complications septiques. La stratégie « step up approach » doit dorénavant guider la prise en charge et le pronostic des patients. L’évolution du traitement conservateur ces dernières années a permis de diminuer le recours à la chirurgie, et de diminuer la morbi mortalité. Notre travail révèle que la publication à elle seule de Guidelines est insuffisante pour modifier la pratique et soulève la question de savoir comment communiquer au mieux les recommandations des sociétés savantes.