Fr | En
Les e-mémoires de l'Académie Nationale de Chirurgie

La prothèse totale du genou à charnière et le groupe GUEPAR (Groupe pour l’Utilisation et l’Étude des Prothèses ARticulaires)

NORDIN JY | AUBRIOT JH (†) | PIDHORZ L | GUEPAR

Séance du mercredi 16 octobre 2019 (France, terre d'innovations en chirurgie orthopédique et traumatologique)

N° de DOI : 10.26299/peev-ak96/emem.2018.2.014

Résumé

En 1968 sept chefs de clinique et un jeune professeur agrégé des principaux services de chirurgie orthopédique et traumatologique des Hôpitaux de l'Assistance Publique de Paris se réunirent pour concevoir et faire fabriquer en France une nouvelle prothèse charnière du genou.
Leur groupe et la prothèse prirent le nom de GUEPAR ((Groupe pour l'Utilisation et l’Etude des Prothèses ARticulaires).
La première prothèse a été posée en octobre 1970.
En chrome cobalt molybdène sa particularité essentielle par rapport aux charnières existantes est la position postérieure et surélevée de 15 mm de son axe par rapport à l’interligne autorisant une flexion complète de la prothèse, un bon déroulement du tibia sous le fémur, une course rotulienne assez proche de la normale et un bras de levier efficace pour l’action du quadriceps. De plus elle autorise une résection fémorale osseuse et tibiale au total de 18 mm, relativement économique pour faciliter une éventuelle reprise par arthrodèse. Les tiges intra médullaire avec un valgus fémoral de 7° sont scellées.
En 1981, après quelques publications intermédiaires, les résultats de 183 prothèses GUEPAR ayant au minimum cinq ans de recul (126 gonarthroses chez des patients ayant un âge moyen de 73,1 ans, 53 arthrites rhumatoides d’âge moyen 59,8 ans et cinq arthropathies neurogènes) étaient publiés.
Trois décès par arrêt cardiaque et deux embolies pulmonaires dont l'une certainement par embolie graisseuse furent observés. Les complications rotuliennes étaient les plus fréquentes des complications locales : 22 luxations (16 %) et 16 subluxations (11 %) ; seules 10 % durent être réopérés par transposition de la tubérosité tibiale antérieure avec un seul échec. Avec un recul d’un à huit ans 15 infections profondes (8,3 % : cinq précoces et 10 tardives) étaient reprises, cinq patients, conservant une prothèse marchaient sans douleur ni contention externe. Les descellements aseptiques (26 cas) étaient assez souvent paradoxalement bien tolérés : seulement 10 genoux (6 %) furent réopérés avec neuf changements de prothèse et une arthrodèse. Les résultats fonctionnels pour 90 genoux ayant un dossier complet avec conservation de leur prothèse étaient avec un recul de cinq à huit ans : huit TB, 46 Bon, 26 Moyen 26 et 10 Mauvais.
A partir de 1975, nous modifiâmes progressivement quelques caractéristiques de la GUEPAR, principalement pour mieux s’adapter à la morphologie osseuse et diminuer la fréquence des problèmes rotuliens, conduisant ainsi au modèle GUEPAR II. L’étude de 155 prothèses de ce modèle, dont 35,4 % de reprise d’anciennes prothèses, retrouvait sept décès per ou post op précoces survenant chez des sujets âgés. Le taux d’infection restait encore élevé (8,3 % d’infections précoces et tardives) mais l’usage d’un scellement aux antibiotiques, sur 51 genoux sans antécédent chirurgical, le diminuait dans un rapport de 5 à 1. Les chiffres de descellement aseptique étaient plus optimistes avec l’utilisation des tiges modifiées car nous n’observions que deux descellements fémoro-tibiaux (1,4 %) mais six du médaillon rotulien, dont trois douloureux associés à des fractures de rotule alors que pratiquement toutes les prothèses GUEPAR II étaient implantées avec un médaillon rotulien. Les Résultats fonctionnels, sur 120 genoux opérés entre 1977 et 1984 avec un recul moyen de trois ans et demi, 40 ayant un recul supérieur à cinq ans, montraient un pourcentage de très bons et bon résultats atteignant 84 % pour la GUEPAR II (75 % pour les reprises de prothèse sur 44 cas) alors qu'il n'était que de 60 % pour les GUEPAR I ; ceci nous semble lié à des indications plus sélectionnées et au meilleur positionnement des implants favorisé par les modifications des tiges diaphysaires plus remplissantes.
En conclusion La prothèse GUEPAR Charnière a connu sa période « glorieuse » en France comme à l’étranger dans les années 1970-1980. Par la suite ses indications ont diminué progressivement avec le développement par le groupe de prothèses semi contraintes efficaces. La prothèse charnière le plus souvent rotatoire peut être actuellement proposée en cas de grande incapacité ligamentaire et importante destructions osseuses, en particulier dans le cadre de reprises de prothèse.