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Les e-mémoires de l'Académie Nationale de Chirurgie

La transplantation trachéale sans immunosuppression. Etude expérimentale sur modèle lagomorpheTracheal transplantation without immunosuppressive therapy in a rabbit model

WURTZ A | HUBERT T | HYSI I | COPIN MC | RAMON P | KIPNIS E | FAYOUX P | ZAWADZKI C | JASHARI R | UNG A

Séance du mercredi 08 avril 2015 (NOUVEAUTÉS EN CHIRURGIE THORACIQUE)

Résumé

Objectifs. La transplantation trachéale soulève deux problèmes : l’absence de pédicule vasculaire individualisé, qui autoriserait une revascularisation immédiate du greffon et le rejet immunologique rendant nécessaire une immunosuppression, contre-indiquée en cancérologie. Pour résoudre ces problèmes, et compte tenu du rôle essentiel joué par l’épithélium respiratoire dans le rejet, nous avons expérimenté l’allogreffe trachéale dénudée d’épithélium et cryopréservée.Méthodes. Onze lapins New Zealand femelles furent donneurs de trachée laquelle fut dénudée de son épithélium et cryopréservée. Lors de la première phase (transplantation hétérotopique), 13 lapins mâles ont reçu des segments longs de trachée (10/12 anneaux), avec ou sans tuteur interne, enveloppés dans un lambeau de fascia latéro-thoracique. Puis, 14 transplantations orthotopiques ont été effectuées : 3 avec des segments longs, après revascularisation fasciale hétérotopique et 11 en un temps, de segments moyens (6/8 anneaux) ou courts (4/5 anneaux), revascularisés in situ par les muscles sous hyoïdiens. Un suivi bronchoscopique a été effectué. Aucun traitement immunosuppresseur n’a été administré. Résultats. Après transplantation hétérotopique, les greffons avec tuteur ont gardé une morphologie satisfaisante, jusqu’à J91. Après transplantation orthotopique, quatre animaux ont été sacrifiés de J33 à J220. La survie des autres a varié de zéro à 47 jours (moyenne 19,6 ± 16,7). En dehors des trois animaux décédés de complications lors de la deuxième phase, les greffons avaient une rigidité satisfaisante et étaient revascularisés. Microscopiquement, la néo angiogenèse était présente et l’inflammation variable, mais dépourvue de lymphocytes. Les événements apoptotiques évoquaient un rejet a minima. Les anneaux cartilagineux se calcifiaient progressivement, assurant la rigidité des greffons. Après transplantation orthotopique, des degrés variables de prolifération endoluminale fibroblastique provenant de la lamina propria étaient observés, s’organisant en fibrose collagène après 45 jours. La régénération épithéliale était constante. Finalement, la fibrose de la lamina propria a entraîné une sténose critique, essentiellement chez les animaux ayant reçus des greffons longs et moyens.Conclusion. Nous avons démontré la revascularisation, la tolérance immunitaire et la conservation des qualités biomécaniques de l’allogreffe trachéale dénudée d’épithélium et cryopréservée en hétérotopie, ainsi que la faisabilité de la transplantation trachéale orthotopique sans immunosuppression avec ce greffon. Des investigations dans une espèce de grande taille sont nécessaires avant d’envisager des applications cliniques.