Traitement par endoprothèse des anévrismes aortiques.
BRANCHEREAU A | BARTOLI M
Séance du lundi 05 décembre 2005 (SEANCE COMMUNE AVEC LA SOCIETE DE CHIRURGIE DE MARSEILLE)
Résumé
Cette méthode radicalement différente du traitement chirurgical par résection ou mise à plat greffe des anévrismes aortiques est née du concept imaginé par Parodi en 1991. A partir du concept initial d'un tube prothétique interposé entre deux stents et introduit par cathétérisme à partir d'une artère fémorale, les endoprothèses aortiques ont considérablement évolué : endoprothèses bifurquées modulaires ou monocorps, endoprothèses aorto-uni-iliaques combinées avec un pontage croisé, endoprothèses destinées à l'aorte thoracique, endoprothèses sur mesure, enfin endoprothèses fenêtrées ou munies de branches qui sont en train de voir le jour. Le but de ces techniques est de minorer l'agression chirurgicale en évitant la laparotomie (ou la thoracotomie) et surtout le clampage aortique dont le caractère délétère a été clairement démontré en particulier chez les sujets présentant une cardiopathie. Les limites de la technique sont liées à la morphologie des anévrismes et aux lésions artérielles associées qui conditionnent la faisabilité de la méthode. Les inconvénients sont liés aux complications qui sont susceptibles d'apparaître dans le suivi de ces patients et tout au long de leur vie. Ces complications sont les endofuites qui se définissent par la réinjection du sac anévrismal par le sang circulant et traduisent l'échec de la méthode, les migrations du dispositif qui aboutissent généralement à une endofuite, les détériorations et dislocations du matériel, les oblitérations artérielles, les ruptures d'anévrisme traduisant l'échec souvent fatal du traitement et dont la fréquence est estimée d'après la littérature à 1 % par an. Le taux global des complications nécessitant un geste complémentaire observées dans le registre Eurostar portant sur 6787 patients était en 2005 de 11 % sur 9 ans de suivi. Le bénéficie attendu est une moindre mortalité périopératoire associée à une amélioration du confort et de la qualité de vie des patients. Concernant les anévrismes de l'aorte abdominale (AAA), deux essais randomisés (EVAR1 et Dream Trial) ont montré une moindre mortalité au 30ème jour par rapport à la chirurgie conventionnelle : 1,7 % versus 4,7 % dans EVAR et 2,1 % versus 5,7 % dans Dream Trial respectivement. Cependant, cette différence de mortalité disparaît si on compare les deux cohortes à un an. Il est vraisemblable que le bénéfice serait plus net si on comparait uniquement des patients à risque opératoire élevé. Dans cette catégorie en effet, la mortalité de la chirurgie pour AAA en dehors de l'urgence est de 2,8 à 9,9 % dans les séries les plus récentes. Le bénéfice en terme de qualité de vie est probable ; il pourrait être lié à une réhabilitation plus facile et à l'absence des désordres sexuels fréquemment observés après dissection des plexus préaortiques au cours de la chirurgie conventionnelle. Les indications de traitement par endoprothèse pour AAA en France font l'objet d'une réglementation rigoureuse mise au point par l'AFSSAPS et unique au monde : les endoprothèses doivent être réservées aux patients dits à risque opératoire élevé selon des critères précis et objectifs. Les firmes qui les commercialisent ont l'obligation de rendre compte du suivi et de la surveillance des patients. Cette surveillance essentielle et obligatoire doit être effectuée par une TDM tous les 6 mois puis tous les ans. Les endoprothèses pour anévrisme de l'aorte thoracique (ou pour dissection) représentent un nombre de cas potentiels moins importants. A priori, du fait de la plus grande mortalité-morbidité de cette chirurgie, le bénéfice attendu du traitement endovasculaire paraît plus grand et plus facile à objectiver. Il ne faut pas perdre de vue cependant que la mortalité et la survenue de complications neurologiques existent aussi après traitement endovasculaire ; leur fréquence d'après la littérature peut être estimée de 0 à 6 % pour les complications neurologiques et de 3,5 à 12,5 % pour la mortalité. Les complications de ces endoprothèses au cours du suivi sont les mêmes que celles précédemment décrites au niveau abdominal. De plus, les matériaux utilisés sont inspirés de ceux qui ont été initialement mis au point pour les AAA ; ils ne sont donc pas forcément adaptés à l'aorte thoracique. La force radiale et/ou les crochets nécessaires à un bon ancrage de la prothèse peuvent être à l'origine d'une perforation de l'aorte en particulier en cas de dissection. La flexibilité du matériel de cathétérisme est souvent insuffisante pour naviguer dans les tortuosités de l'aorte descendante ou au niveau de la crosse aortique.