Ethique et prélèvement d'organes.Ethics and organ procurement.
Séance du mercredi 20 octobre 2004 (TRANSPLANTATIONS A PARTIR DE DONNEURS VIVANTS)
Résumé
Les plus récentes informations en provenance de l’EtablissementFrançais des Greffes (EFG) font apparaître que le problème duconsentement au prélèvement d’un organe sur une personne en étatde mort encéphalique en vue de sa greffe sur un malade, en bref, ledon d’organe, se heurte désespérément dans notre pays à des blocagespsychologiques, philosophiques, mais également matériels.Comment expliquer que perdure cette frilosité de nos concitoyens àl’égard de ce geste qui peut sauver une vie ? Le taux d’oppositionau prélèvement chez les personnes en état de mort encéphaliquedemeure autour de 1 sur 3 (32%). En 2003, seulement à peine unepersonne sur deux en état de mort encéphalique récente a été prélevée.Les listes d’attente demeurent impressionnantes (6597), et lenombre de décès annuels (243) observé chez ces malades en attentede greffe, bien que stable, est inacceptable. Les comportements deplus en plus individualistes observés au sein de notre société, officialiséspar la notion « d’autonomie de la personne » expliquentl’indifférence de beaucoup à ce qui devrait être perçu comme unproblème prioritaire de santé publique. Mais encore la transplantationd’organe ne ferait-elle pas partie des soins dont l’efficacité estreconnue ? En fait, la question n’a jamais été posée en ces termes,pas plus qu’ont jamais été entreprises les évaluations rigoureuses entermes économique et de qualité de vie que le CCNE (ComitéConsultatif National d’Ethique) réclame depuis 1988 dans son rapportintitulé « Aspects éthiques des choix collectifs en matière desanté ». Pourquoi la recherche d’une solution à la pénurie de donsd’organes demeure t-elle de la seule initiative des médecins et desassociations de malades, puissamment relayés, il est vrai par l’EFG,mais pas pour autant plus écoutés des responsables politiques et deceux qui répartissent les moyens ? Si l’on exclut toute idée de commercialisationdes greffons, pour nous éthiquement inacceptable,diverses orientations techniques nouvelles tentent de compenser lapénurie de don d’organes prélevés sur des personnes en état de mortencéphalique : prélèvement sur donneur vivant, prélèvement sur« coeur non battant ». Elles soulèvent elles-mêmes de difficilesinterrogations éthiques. En fait il n’y a pas de solution valable etdurable sans un choix formel de notre société, un choix collectifdéterminé, et la volonté correspondante des politiques de la faireaccepter, voire de l’imposer. Une réforme de la Sécurité socialeincluant la notion du « panier de soins et services » eut été unebonne occasion d’y placer les transplantations d’organes, d’autantqu’il ne s’agissait pas d’un problème de coût mais seulement duchoix préférentiel d’une thérapeutique validée basée sur la solidarité.Hélas, cette réforme espérée et trop longtemps attendue ne sembleplus à l’ordre du jour.