Discours du Président
Séance du mercredi 20 janvier 2016 (SÉANCE SOLENNELLE)
Résumé
Séance Solennelle 20 janvier 2016 Académie de ChirurgieAllocution du Président Georges MANTIONMesdames, Messieurs,Je déclare ouverte la séance solennelle de l’Académie Nationale de Chirurgie.Je tiens d’abord à remercier les hautes personnalités qui nous honorent de leur présence :Son excellence Monsieur Amar Bendjama, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de la République Algérienne démocratique et populaire.Son excellence Monsieur Vincent Mertens de Wilmars, Ambassadeur du Royaume de Belgique.Son excellence Monsieur Paul Dühr, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Grand-Duché de Luxembourg.Monsieur Domenico La Spina, Premier Conseiller à l’Ambassade de la République d’Italie, (représentant Son excellence Monsieur Giandomenico MAGLIANO).Monsieur RU Zhitao, Attaché scientifique à l’Ambassade de la République populaire de Chine, (représentant Son excellence Monsieur ZHAI Jun).Monsieur Eduardo Nazareno Muñoz, Chargé de la coopération scientifique à l'Ambassade de la République d’Argentine, (représentant SEM María DEL CARMEN SQUEFF).Monsieur Francisco Elías de Tejada, Conseiller Culturel à l’Ambassade du Royaume d’Espagne, (représentant Son excellence Monsieur Ramón de MIGUEL).Madame Le Thy Nguyen, Conseiller scientifique à l’Ambassade de la Confédération Suisse, (représentant Son excellence Monsieur Bernardino REGAZZONI).Son excellence Madame Luca NICULESCIU nous prie d’excuser son absence du fait la visite officielle du 1er ministre de la République de Roumanie.Le Médecin Général Inspecteur François Pons, Directeur de l'École du Val de Grâce.Monsieur Jean-Louis Fousseret, Maire de la ville de Besançon.Le Professeur Pierre Bégué, Président de l’Académie nationale de Médecine, le Professeur Daniel Couturier, Secrétaire perpétuel et le Professeur Michel Huguier, Président de la 2ème division.Le Professeur Claude Monneret, Président de l’Académie nationale de Pharmacie et Madame Agnès Artiges, Secrétaire générale.Le Professeur Hervé Bazin, Président de l’Académie Vétérinaire de France, le Professeur Christian Dumon, Past Président et le Professeur Patrick Le Bail, Vice-Président.Le Professeur Benoît Lengelé, notre invité d’honneur qui a fait le déplacement depuis la Belgique pour cette occasion.Messieurs les anciens Présidents de l’Académie Nationale de Chirurgie,Mesdames, Messieurs les représentants des sociétés savantes et des collèges de spécialités chirurgicales,Mesdames, Messieurs les Académiciens,Chers Collègues, Chers Amis, Mesdames, Messieurs,Je mesure l’insigne honneur d’avoir présidé l’Académie Nationale de Chirurgie au cours de cette année 2015 et le privilège de m’exprimer cet après-midi devant vous, au moment de mettre un terme à ce mandat.C’est le moment pour moi de remercier toutes celles et tous ceux qui m’ont apporté aide et soutien pendant toute ma carrière et ils sont nombreux dans cette salle. En tout premier lieu, Françoise, mon épouse, à qui je souhaite rendre un hommage publique bien insuffisant au regard des contraintes imposées pendant toutes ces années et aussi à mes parents disparus, qui m’ont laissé débuter en 1964, à Besançon plutôt qu’à Lyon pour des raisons administratives, des études de médecine tellement improbables pour eux.Dans cette « vieille ville espagnole » à en croire Victor Hugo, l’École de Médecine et le Centre Hospitalier Régional allaient changer de statut pour devenir Faculté autonome et Centre Hospitalier Universitaire. Tout était à faire et beaucoup l’a été, grâce à l’engagement de jeunes professeurs dynamiques, recrutés aux quatre coins de la France. Ce n’est pas un hasard si deux de ces maîtres bisontins sont devenus Présidents de notre Académie : Michel Gillet en 2001 et le regretté Philippe Vichard disparu pendant sa présidence en 2008.Michel Gillet, mon maître, a su donner à tous les internes de chirurgie de Besançon un enthousiasme pour le métier de chirurgien et a beaucoup l’envie de l’enseigner. Cet enthousiasme et cette envie ne m’ont pas quitté depuis 40 ans. Il m’a aussi appris le respect des malades et de leurs familles en particulier en cas de complication ou de conflit. Déjà les réunions de morbi-mortalité, ramenées de ses déplacements dans le cadre du CNU ou du GTCHU (sigles mystérieux pour moi à l’époque) s’étaient imposées dans le service. Sa recommandation était de « ne pas faire ce métier si on n’est pas optimiste » ; je l’ai adoptée après son départ en 1992 à Lausanne de l’autre côté de la montagne du Jura et essayé de le transmettre à l’équipe qui me succède et en premier lieu son chef de service le Professeur Bruno Heyd.Michel Gillet a développé avec notre ami Jean-Philippe Miguet une approche curative d’une maladie peu reconnue à Paris (sauf par Yves Chapuis) mais fréquente dans notre région : l’échinococcose alvéolaire. Cette maladie parasitaire considérée comme « négligée » par l’Organisation Mondiale de la Santé est véhiculée par le renard. Elle se développe comme un cancer à l’intérieur du foie et il n’y a pas de traitement médical curatif à ce jour. L’espérance de vie au moment du diagnostic était inférieure à 10 ans dans les années 70-80.Cette pathologie a été notre motivation principale pour prendre une orientation chirurgicale hépatobiliaire, qui bien que non exclusive, nous a amenés à développer la transplantation hépatique dès 1986. Pour rare qu’elle reste en France, cette parasitose n’en est pas moins présente partout dans le monde avec une incidence et une gravité inquiétantes dans certaines régions en particulier les provinces de l’ouest de la Chine. Notre compétence pour cette maladie a été rendue particulièrement lisible par la reconnaissance en 1997 d’un « centre collaborateur OMS pour le traitement et la prévention des échinococcoses humaines » grâce à l’énergie de mes amies Dominique Vuitton et Solange Bresson-Hadni.Je suis particulièrement fier d’avoir dirigé de 2005 à 2009 cette structure pluridisciplinaire référente dans le monde entier. C’est la lutte contre cette maladie rare, mortelle, qui m’a permis de développer des relations et de voyager partout dans le monde et en particulier en Chine à partir de 1995 avec la complicité de mon élève devenu un très grand ami le Professeur Wen Hao, ici présent malgré un handicap locomoteur transitoire.Cet hommage envers mes maîtres ne serait pas complet sans citer Pierre Carayon, mon maître lors de ma spécialisation initiale de gastroentérologie, initiateur en France de la lutte contre les addictions dans les professions de santé ; Henry Duvernoy neuroanatomiste de renommée mondiale qui m’a accueilli pendant de nombreuses années dans son laboratoire, et Francis Weil, soutien toujours fidèle, célèbre pour avoir introduit l’imagerie par ultra son en France dans les années 70. Enfin le tableau ne serait pas complet si je n’évoquais pas le souvenir toujours présent du Docteur Emile Girard Chef de Service à temps partiel, ancien Interne des Hôpitaux de Paris, qui a accompagné mes premiers pas dans un bloc opératoire lors de ma nomination comme externe des hôpitaux au dernier concours de 1967.Je voudrais vous entretenir maintenant de notre Académie. Nous sommes ici dans le Grand Amphithéâtre du collège de chirurgie édifié par Louis XV pour l’Académie Royale de Chirurgie qui a occupé ces locaux de 1774 à 1793. En fait, le grand projet de cette année 2015 est le retour de l’Académie sur son site historique au moment de sa fondation en 1731 : je veux parler de Saint Côme et de l’amphithéâtre Joubert au 5 rue de l’École de Médecine tout près d’ici.Il existe un vrai consensus pour ce projet qui a beaucoup de sens avec une légitimité historique et aussi la garantie d’une forte visibilité pour la chirurgie française. Surtout en y associant les Conseils Nationaux Professionnels des 12 Spécialités Chirurgicales. Beaucoup d’énergie et de démarches seront nécessaires, l’objectif est ambitieux mais les volontés sont fortes derrière François Richard chargé de cette mission pour la faire aboutir.L’année 2015 a été marquée par plusieurs innovations. En premier lieu, la modification de nos statuts permettant à des spécialistes non chirurgiens, « au sens de la qualification ordinale », d’être élus membres associés. La base de la réflexion a été le développement des interventions mini-invasives par ces collègues radiologues, gastroentérologues et cardiologues. Ils avaient, jusqu’à maintenant, le statut, quelque peu frustrant, de membres libres et participaient à la section interventionnelle de l’Académie.Régulièrement, lors de nos séances, ils ont présenté des prouesses thérapeutiques inimaginables il y a encore 10 ans. Ils pourront désormais intégrer les instances décisionnelles de l’Académie.De plus, l’étymologie grecque du mot chirurgie (« Kheirourgia ») qui ramène à la notion « de travail avec les mains », et à partir d’Hippocrate, « à la thérapeutique médicale comportant une intervention manuelle », s’applique tout à fait à ces spécialistes. Pour toutes ces raisons, cette modification statutaire est légitime et je tiens à remercier le Conseil d’Administration et l’Assemblée Générale d’avoir soutenu cette réforme initiée par Gérard Morvan. Il nous appartient d’accompagner cette évolution prometteuse pour qu’elle soit une source de progrès pour chaque discipline dans le respect des objectifs historiques de l’Académie.Toujours dans un esprit d’ouverture vis-à-vis des jeunes chirurgiens cette fois, la formation initiale transversale a été mise en place en 2015, en partenariat avec le Conseil National des Jeunes Chirurgiens. La première séance co-organisée par Xavier Martin a eu lieu, les 9 et 10 octobre 2015, « sur les modalités d’exercice de la chirurgie » avec 30 participants, puis la masterclass du 15 décembre sur « les prélèvements d’organes en vue de transplantation » organisée en partenariat avec l’École Française de prélèvement, Benoît Barrou et Emmanuel Bolalewski pour 70 participants. Je remercie tous les experts qui ont acceptés de s’engager avec l’Académie Nationale de Chirurgie pour ces formations innovantes, le succès de leurs interventions laisse augurer d’un bon avenir pour la poursuite de ces formations.Je souhaite, dans le temps qui me reste, vous parler de l’avenir de la chirurgie ! Cette réflexion est dans tous les esprits du fait des réorganisations structurelles, des lois de Santé qui se succèdent, des réformes des études qui tardent à se mettre en place ou des bouleversements technologiques déjà évoqués.À côté des analyses extrêmes, développées dans des livres récents par des collègues Académiciens, Guy Vallencien d’une part, avec « la médecine sans médecin : quel avenir pour la chirurgie ? » et Bernard Kron : « chirurgie : chronique d’une mort annoncée », je suis sûr qu’il y a la place pour un accompagnement éclairé qui ne sera pas palliatif.Si la chirurgie ne doit plus être considérée comme un art, elle reste un exercice difficile. Et pas simplement du fait des progrès techniques permis par la sur-spécialisation, mais surtout parce qu’elle soigne des hommes. Comme nous l’a rappelé le président Iradj Gandjbakhch en 2011, nous devons garder à l’esprit que la chirurgie reste dérogatoire au code civil, qui interdit de violer le principe intangible de l’intégrité du corps humain. Peter Vogt nous a par ailleurs rappelés lors de son discours inaugural au Congrès Allemand de Munich en avril dernier que « résumer la chirurgie à des actes techniques, c’est réduire le chirurgien à un rôle de technicien». Comme vous le savez tous, les exigences de notre métier vont bien au-delà de la technique.Pour les mêmes raisons, on peut s’interroger à propos des réserves récentes formulées par certains collègues sur leur capacité à prendre en charge les urgences de leur discipline, du fait de leur hyperspécialisation. Ceci nous paraît acceptable dans certaines surspécialités, comme la chirurgie de la main, organisée pour prendre en charge les cas réglés mais aussi les cas urgents. Nous pensons que le métier de chirurgien, dans toute l’acceptation actuelle du terme, ne peut pas s’affranchir de la confrontation aux situations urgentes. À partir du moment, où la compétence est acquise lors de la formation initiale, il paraît nécessaire de l’entretenir au cours de la vie professionnelle sauf à imaginer la formation de chirurgiens urgentistes dans chaque spécialité, avec le risque d’une dévalorisation du métier, voire du service rendu.L’Académie, qui a survécu à tellement de bouleversements depuis sa création en 1731, continuera à s’engager dans son rôle de magistère moral de notre profession. Imaginez le futur est de l’ordre du rêve, « seul l’imprévisible est sûr » comme aime à le dire François Richard. Accompagner le progrès, diffuser les innovations, transmettre l’enthousiasme pour ce métier fabuleux, tellement gratifiant, restent bien les buts concrets de notre compagnie.Je ne peux pas terminer ce discours sans remercier le bureau qui m’a soutenu pendant cette année de présidence en soulignant la convivialité et la sérénité des échanges malgré le climat de crise et d’insécurité qui a sévi en France pendant cette période. Je remercie plus particulièrement Philippe Marre, notre Secrétaire Général et Pascale Decauville, Directeur du Développement et de la Communication pour leur implication dans la gestion du quotidien et leur engagement dans l’accomplissement des projets, Georges Casanova pour la rigueur de sa gestion comptable et sa bonne humeur communicative, nos deux secrétaires annuels Gérard Morvan et Philippe Topart que vous allez écouter dans un instant, Bernard Andreassian et Fatiha El Morabit pour le développement de notre revue en ligne et enfin Pascal Bouret, technicien vidéo qui assure en ce moment même avec Raja Fares, la retransmission de cette séance, accessible par tous dans quelques heures sur le site de l’Académie Nationale de Chirurgie sans code ni mot de passe. Bien sûr je n’oublie Henri Judet, héritier d’une illustre lignée d’orthopédistes qui va me succéder dans 8 jours et à qui je souhaite très bonne chance pour son année de Présidence ainsi qu’à notre vice-Président Dominique Franco.Éminents Invités, Chers Collègues Académiciens, Mesdames, Messieurs, j’espère vous avoir démontré que l’Académie Nationale de Chirurgie n’est pas « une vieille dame endormie se reposant sur les lauriers d’un glorieux passé », je vous remercie de votre attention. « Nous avons maintenant le plaisir d’écouter le Quatuor Audelma, avec Mathilde Gandar 1er violon, Gabriela Gloanec 2ème violon, Leila Pradel alto et Sarah Catil violoncelle.Nous devons sa présence au Pr Michel GERMAIN. Le Quatuor AUDELMA va nous interpréter le Presto du Quatuor N°3 en Sol Majeur de Wolfgang Amadeus Mozart ». « Je donne maintenant la parole à Philippe TOPART, Secrétaire Annuel, pour la présentation des travaux de l’Académie de Chirurgie pendant l’année 2015. Je vous prie d’excuser Gérard MORVAN, empêché ».