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Séance du mercredi 30 octobre 2013 (SEANCE COMMUNE ANM/ANC : CHIRURGIE FONCTIONNELLE)
Résumé
L’incontinence d’urine, qui est définie par la perte involontaire des urines à travers l’urethre, est une perturbation fonctionnelle de l’appareil vésico-sphinctérien qui entraîne souvent une altération notable de la qualité de vie des personnes atteintesA l’âge adulte, l’incontinence survient de façon prédominante chez la femme en raison des facteurs prédisposants indéniables que sont d’une part les spécificités anatomiques du périnée féminin et d’autre part la survenue de maternités et la ménopause. Si environ 50% de fuites très occasionnelles sont retrouvées dans les enquêtes auprès d’étudiantes ou de femmes nullipares, on considère en fait que 10 à 20% des femmes sont atteintes d’incontinence invalidante source de handicap physique mais aussi psychologique et social.Les causes de l’incontinence urinaire féminine sont multifactorielles, les traitements doivent donc être adaptés à chaque femme en fonction des mécanismes précisés au terme de l’examen clinique et des explorations complémentaires, enfin un certain nombre de traitements , notamment chirurgicaux peuvent guérir l’incontinence mais au prix de troubles mictionnels secondaires qu’il faut savoir prévenir ou corriger. La prise en charge optimale de ce handicap nécessite la maîtrise par le thérapeute de l’ensemble de ces éléments de décision .Ils seront explicités à partir des courbes urodynamiques normales et pathologiques en distinguant les mécanismes de l’incontinence d’effort, de l’incontinence par trouble vésical et des associations. En pratique : L’interrogatoire de la patiente permet de distinguer l’incontinence d’effort pure de l’incontinence par impériosité, mais cela ne précise pas les mécanismes en cause et bien souvent l’incontinence est mixte. L’examen clinique est indispensable pour rechercher un prolapsus associé (autre conséquence du même phénomène d’altération tissulaire) , pour contrôler la réalité et les conditions de survenue de la fuite, pour vérifier l’efficacité ou non des manœuvres de correction des déficits pelviens qui orienteront un geste chirurgical éventuel. A l’issue de ce bilan l’incontinence urinaire typique et pure d’intensité faible ou modérée peut faire l’objet d’un traitement par rééducation périnéale, dans les autres cas un examen urodynamique est recommandé pour expertiser les différents mécanismes possibles et faire le bilan des forces de retenue et d’expulsion et préciser les indications des différents traitements:Les incontinences avec instabilité vésicale bénéficient en première intention des traitements pharmacologiques per os (parasympathicolytiques) Dans les formes résistantes de nouvelles drogues sont testées soit en instillations endo-vésicales ( substances vanilloïdes) soit en injection intra-détrusorienne ( toxine botulique) , les urologues utilisent également la stimulation électrique de la racine nerveuse S3 qui en cas de test positif peut aboutir à la mise en place de stimulateur définitif sous cutané).En cas de troubles de compliance majeurs des interventions d’agrandissement vésical peuvent être nécessaires.Les incontinences d’effort importantes, de même que celles qui résistent à la rééducation sont du ressort d’une chirurgie à visée fonctionnelle comme nous allons le voir.Puisque l’incontinence urinaire résulte de la perte de l’équilibre physiologique entre les forces d’expulsion qui ne restent plus inférieures aux forces de retenue, le but des différents traitements sera de restaurer cet équilibre en faveur des forces de retenue.On comprend donc la nécessité de bien rechercher pour chaque patiente le ou les facteurs responsables de la perte de cet équilibre car , par exemple, il ne sert à rien d’utiliser un traitement médicamenteux s’il n’y a pas d’anomalie de la contraction vésicale, inversement si on trouve chez une patiente deux anomalies en cause la correction d’une seule de ces anomalies peut parfois suffire à restaurer un équilibre permettant la continence ( une amélioration du mécanisme passif de fermeture de l’urèthre peut être efficace même si la contraction du sphincter reste trop faible).Par ailleurs l’incontinence urinaire féminine est une pathologie de la fonction vésico-sphinctérienne qui le plus souvent ( à l’exception des causes neurologiques) ne met pas en cause la vie des femmes qui en souffrent mais entraîne souvent une altération importante de la qualité de vie, ceci impose donc à la fois de bien apprécier le retentissement de ce handicap et, en cas de plusieurs possibilités de traitements, de commencer par le traitement le moins agressif . Quand proposer un traitement chirurgical à visée fonctionnelle ?Il n’y a jamais d’urgence à proposer une intervention chirurgicale pour incontinence mais inversement lorsque d’autres traitements ont échoué et que l’indication de la chirurgie est pertinente il n’y a aucune raison de récuser la chirurgie chez des femmes jeunes en raison de leur âge .Dans tous les cas une information sur le type et le but de l’opération chirurgicale, sur son taux réel de succès mais aussi sur les troubles mictionnels secondaires qu’elle peut entraîner est indispensable ; c’est la connaissance des avantages mais aussi des inconvénients possibles de l’intervention proposée qui permettra à la patiente de prendre sa décision en fonction de ces données et de la gêne de son handicap.Y a-t-il un seul type de traitement chirurgical qui guérit toutes les femmes incontinentes ? La réponse est clairement non car aucune intervention chirurgicale ne corrige tous les facteurs possibles à l’origine de l’incontinence.- Certaines interventions corrigent le défaut de soutien du col vésical et/ou de l'urèthre responsable de l’absence d’occlusion passive de ceux-ci lors de l’effort. Leur mode d’action explique la survenue dans 10 à 30% des cas de troubles mictionnels induits ( difficulté d’évacuation vésicale, envie fréquente ou impérieuse d’uriner) en cas de compression de l’urethre.Il s’agissait des colpo-suspensions (Burch), des bandelettes ou frondes (aponévrotiques ou synthétiques) sous cervicales ( Gobbel-Stoeckel et ses nombreuses variantes) réalisées par voie abdominale, vaginale ou mixte ,remplacées actuellement par des bandelettes ( le plus souvent synthétiques) sous uréthrales (TVT rétropubienne ou TOT trans obturatrice et leurs variantes) par voie mini-invasive vaginale ou abdominale avec ou sans un contrôle endoscopique. Ces interventions n’ont aucune efficacité sur la pression de l’urèthre en cas d’insuffisance sphinctérienne ou sur les anomalies de contraction vésicale. D’autres interventions visent à compenser l’insuffisance sphinctérienne en créant un certain degré d’obstacle cervical ( avec parfois dysurie ou résidu): il s’agit des méthodes d’injections endo ou peri-urèthrales , sous contrôle endoscopique, de différentes substances ( téflon, graisse, collagène, silicone …) ou surtout de ballons periuréthraux ajustables et gonflables . Une intervention corrige l’insuffisance sphinctérienne en reproduisant le fonctionnement physiologique au moyen d’une manchette gonflable en silicone qui comprime l’urèthre pendant le remplissage vésical et le libère pendant la miction, elle corrige également le défaut de soutien uréthro-cervical mais est contre-indiquée en cas d’hyperactivité vésicale : il s’agit du sphincter urinaire artificiel, dont un nouveau modèle « intelligent » sera présenté. - Enfin certaines interventions ont pour but de corriger le défaut d’élasticité (compliance) vésicale ou les hyperactivités vésicales résistantes aux traitements médicamenteux : il s’agit des plasties d’agrandissement vésicales à basses pressions utilisant des segments intestinaux détubulés ( pour neutraliser le péristaltisme du segment d’intestin suturé à la vessie) A quelles patientes proposer un traitement chirurgical ?- Essentiellement à celles qui souffrent d’une incontinence urinaire d’effort pureSi le mécanisme essentiel est le défaut de soutien du hamac avec hypermobilité urèthrale corrigée par les manœuvres cliniques de soutien cervical (Bonney) et urèthral distal , les interventions de colpo-suspension, de bandelettes sous-cervicales ou surtout sous-urèthrales sont indiquées avec des taux de succès comparables de 80 à 90% à moyen terme, les colpo-suspensions se dégradant plus à long terme. Actuellement les bandelettes sous-urèthrales (type TVT, TOT et variantes) sont les plus utilisées dans cette indication en raison de la brièveté de l’hospitalisation et du faible taux de douleur post opératoire.Si une insuffisance sphinctérienne est associée les taux de succès diminuent de 20% environ- Les incontinences aux efforts minimes voire à la marche ou les incontinences récidivantes malgré les interventions de colpo-suspensions ou de bandelettes, même sous-urèthrales, sont le plus souvent dues à une insuffisance sphinctérienne importante. Les interventions classiques sont peu efficaces. En cas d’incontinence de volume ou de fréquence faible les injections urèthrales sont de moins en moins utilisées (30 à 40% de succès à court terme), et remplacées par les ballons ajustables (70% de succès) dans les autres cas le sphincter artificiel est le meilleur traitement (80 à 90% de succès à long terme)- En cas d’incontinence mixte avec instabilité ou hyperactivité vésicale associée, la chirurgie n’est pas indiquée d’emblée même s’il existe un défaut de soutien ; par contre si après correction médicamenteuse de l’instabilité vésicale, il persiste une incontinence à l’effort gênante la chirurgie retrouve ses droits.