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The e-mémoires of the Académie Nationale de Chirurgie

Prothèses articulaires du coude

Jean-Luc ROUX

Seance of wednesday 29 october 2025 (Disparition des implants articulaires du membre supérieur (hors épaule) consécutive à la réglementation européenne (MDR) sur les DMI.)

DOI number : 10.2699/tbt1-8h91/emem.2025.44.02

Abstract

Les prothèses de coude regroupent plusieurs types d’implants : les prothèses totales qui se limitent le plus souvent à une articulation huméro-ulnaire (avec ou sans charnière), les prothèses de remplacement de la tête radiale (monobloc ou modulaire), les prothèses humérales distales, les prothèses huméro-radiales, les prothèses radio-ulnaires supérieures ou encore les prothèses massives de reconstruction.
Contrairement à d’autres articulations comme la hanche où les prothèses offrent dans l’immense majorité des cas une articulation « oubliée », les prothèses de coude n’atteignent que rarement ce résultat. Pour cet objectif, qui devrait être celui de toute prothèse articulaire, la recherche doit continuer.
Pour avancer et obtenir des « prothèses oubliées durables » nous n’avons pas d’autre choix que poursuivre les essais cliniques. Ce « tâtonnement clinique » concerne essentiellement la conception biomécanique des implants dont la composition n’est faite que de matériaux connus, très largement utilisés (titane, chrome, cobalt, polyéthylène ou céramique). Pour le patient, les risques d’un nouvel implant ne sont donc pas liés aux matériaux mais à la conception biomécanique de l’implant.
Pour le coude, il y a une diversité d’implants et les poses sont peu nombreuses : environ 1500 par an en France, soit 100 fois moins que les prothèses de hanche. Avec aussi peu d’indications prothétiques l’expérimentation est limitée.
Dans ces conditions n’est-il pas absurde d’envisager des règles de développement identiques à celles de prothèses que l’on peut considérer comme « abouties » et placées en grand nombre ?
La nouvelle règlementation a non seulement interrompu le développement qui était encore possible il y a quelques années mais aussi contribué à la disparition d’implants existants et fiables.
Les conséquences sont nombreuses. Elles concernent d’abord les patients, qu’ils soient atteints de polyarthrite rhumatoïde, d’arthrose primaire ou post-traumatique, de tumeurs ou victimes de fractures complexes, lorsqu’ils ne peuvent plus bénéficier d’une prothèse, la prise en charge régresse et l’infirmité progresse. Si cette règlementation avait été en vigueur avant le développement des prothèses de hanche, notre espérance de vie serait certainement bien inférieure à celle que nous observons aujourd’hui.
Interrompre le développement c’est aussi mettre un terme aux innovations prothétiques françaises. Grâce à notre système de santé, l’imagination des chirurgiens et des industriels, de nombreuses innovations prothétiques nées dans notre pays ont conquis le monde.
Enfin, peut-être plus grave encore, les jeunes chirurgiens risquent de perdre durablement le lien qui nous unissait aux ingénieurs et aux industriels pour le développement de nouveaux implants.
Pour que les prothèses de coude, de poignet, des métacarpophalangienne et interphalangiennes puissent se développer adoptons une règlementation juste.
Refusons de moins bien traiter nos patients, ne laissons pas l’ « excellence française » disparaitre.