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The e-mémoires of the Académie Nationale de Chirurgie

Fractures sur prothèses totales de genou : une pathologie traumatique d’avenir. A propos de 105 cas.

Elise BERNARD | C. BAUER | F. HOUFANI | F.-J. GALLIOT | A. SCHMITZ | D. MAINARD

Seance of wednesday 23 september 2020 (Séance délocalisée à Nancy)

DOI number : 10.26299/98ey-de46/emem.2020.21.01

Abstract

Les fractures périprothétiques de genou sont de plus en plus fréquentes et deviennent une préoccupation importante en Traumatologie. Elles compromettent la survie des implants et constituent un véritable challenge thérapeutique en particulier chez les sujets âgés. La tendance actuelle est résolument interventionniste. Notre objectif était d’analyser l’efficacité de la prise en charge de ce type de fracture, d’en évaluer les résultats cliniques et radiologiques à long terme, et d’en déduire les facteurs de mauvais pronostic évolutif.
Cette étude rétrospective bicentrique portait sur tous les patients ayant présenté entre 1997 et 2017 une fracture périprothétique sur prothèse totale de genou (PTG). Les fractures étaient analysées selon la classification de la SoFCOT, qui distingue les fractures selon leur siège (types A, B et C en fonction que celle-ci se situe au contact ou plus à distance de la prothèse) et la stabilité des implants sous-jacents (types 1, 2 et 3). Les caractéristiques épidémiologiques, le statut fonctionnel des patients à l’inclusion, le type de prothèse en place, ainsi que les modalités du traitement étaient également recensés.
98 patients ont été pris en charge, pour un total de 105 fractures sur PTG, dont 90 fémorales et 15 tibiales. Le recul moyen était de 2 ans (de 1 à 16 ans). L’âge moyen des patients était de 78 +/- 11 ans. Les patients étaient principalement des femmes (sex-ratio 1/5). 85 fractures étaient de type SoFCOT 1 (implants stables). Un descellement (type 2) était objectivé dans 7 cas, le plus souvent dans les types A, et on retrouvait une ostéolyse (type 3) dans 13 cas (le plus souvent dans les types B). Le traitement orthopédique était réservé aux patients grabataires récusés à l’anesthésie. Les révisions prothétiques étaient systématiques en cas de descellement, les autres fractures étaient traitées par ostéosynthèse. Le taux de consolidation était de 75,2% avec un délai moyen de 4,3 mois. On dénombrait 10 décès dans l’année suivant la fracture (9,5%). Le taux de complications en lien avec la fracture était de 29.5% : 6 sepsis, 7 pertes de réduction, 16 pseudarthroses, 2 descellements secondaires. Le taux de reprises chirurgicales était de 26,7% (28 cas), nécessitant une révision prothétique secondaire dans 9 cas (8,6%).
Au dernier recul, les patients vivaient à leur domicile dans 70% des cas, en maison de retraite dans 25% des cas, et étaient institutionnalisés dans 2,5% des cas. Nos résultats sont similaires aux autres séries de la littérature, avec 50 à 60% de bons et très bons résultats. La morbi-mortalité était significativement liée à l’état général de base du patient et à son autonomie initiale. Les facteurs de mauvais pronostic fonctionnels correspondaient aux fractures SoFCOT B, aux PTG de révision, aux genoux multi opérés. Les résultats étaient malgré tout satisfaisants lorsque le traitement tenait compte à la fois de la qualité osseuse et de la tenue des implants. Les recommandations thérapeutiques peuvent donc suivre un algorithme basé sur la classification de la SoFCOT. Le pronostic de ces fractures reste grevé d’un taux de complication important, avec une perte d’autonomie et une altération de la qualité de vie parfois majeure. La prise en charge doit être agressive, car seule une fixation primaire de qualité permettra la mobilisation immédiate et la remise en charge précoce, l’enjeu étant d’obtenir la consolidation sur un implant stable et un membre aligné afin de rendre au patient un genou fonctionnel. Le traitement offrant le meilleur compromis permet d’optimiser les résultats à long terme.

Hôpital Central, Service de chirurgie orthopédique, traumatologique et Arthroscopique (COTA) CHRU NANCY.