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The e-mémoires of the Académie Nationale de Chirurgie

Anticoagulants en chirurgie orthopédique

Nadia ROSENCHER

Seance of wednesday 04 november 2020 (Quoi de neuf en anesthésie ? Précédée de l'AG élective de 13h30 à 14h30 (vote électronique) EN RAISON DU CONTEXTE SANITAIRE ACTUEL LA SEANCE SE TIENT EXCLUSIVEMENT EN VISIOCONFERENCE)

DOI number : 10.26299/deag-7j56/emem.2020.27.03

Abstract

Les anticoagulants utilisés en chirurgie orthopédique sont essentiellement prescrits en prophylaxie thromboembolique.
Par définition, la prophylaxie est un traitement fait à tous les patients pour éviter un ou plusieurs événements graves. Dans ce contexte de thrombo-prophylaxie, on évite une ou deux thromboses symptomatiques en traitant 100 patients et 1 ou 2 Embolie pulmonaire fatale en traitant 1000 patients. La question que doit se poser tout prescripteur: Quel est le rapport bénéfice/risque d’une telle prophylaxie pour une chirurgie fonctionnelle ?
Les anticoagulants recommandés par la SFAR (1) pour les PTH et PTG sont les HBPM, le fondaparinux, le dabigatran, le rivaroxaban et l’apixaban.
Récemment, la société Européenne d’Anesthésie (2) a introduit pour la PTH, PTG et le la fracture du col du fémur, l’aspirine (qui est un anti-agrégeant plaquettaire) arguant de la réduction de la durée d’hospitalisation avec le RAAC.
Par précaution, ces recommandations restreignent aux patients, n’ayant aucun risque thromboembolique, avec des critères de RAAC, et enfin en associant une compression pneumatique intermittente.
Cependant, l’absence d’étude randomisée récente avec effectif suffisant, ne permet pas de déterminer la dose (faut-il une dose de charge ?), ni la durée, ni l’attitude pour les patients déjà sous aspirine ou sous AINS.
La SFAR a donc demandé au groupe d’experts GIHP (Groupe d’Intérêt en Hémostase Péri-opératoire) de rédiger un complément à ces recommandations. Une seule étude randomisée (EPCAT 2) a été retenue dans ce contexte et uniquement dans les PTH et PTG de l’équipe de R. Anderson, publiée dans le NEJM en 2018. Cette étude montre qu’après 5 jours de rivaroxaban pour tous les patients, puis seulement randomisation entre aspirine et rivaroxaban, le risque thromboembolique symptomatique proximal et EP est le même sous aspirine et sous rivaroxaban. Mais, contrairement, à ce qui était attendu, le saignement est supérieur sous aspirine même si non significatif. L’éditorial du NEJM souligne les biais de cette étude en montrant le très faible recrutement des patients à risque. De plus, compte tenu de l’absence des thromboses symptomatiques dans les critères, l’effectif peut être discuté.
EN conclusion, les suggestions du GIHP sont donc
Pour l’arthroplastie de hanche (PTH) ou de genou (PTG), programmées, dans un parcours optimisé (RAAC ou ambulatoire) tel que défini précédemment, en l’absence de facteurs de risque tels que définis précédemment, l’aspirine peut être proposée dans le cadre d’une thromboprophylaxie veineuse séquentielle selon des modalités d’administration extrapolées de l’étude EPCAT2(3) : après 5 jours d’anticoagulants, l’aspirine pourrait être prescrite à la dose quotidienne de 75 à 100 mg, pendant une durée de 9 jours pour la PTG et 30 jours pour la PTH. Certains anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) non spécifiques (ibuprofène, naproxène) pourraient compromettre l’efficacité antithrombotique de l’aspirine. rivaroxaban et apixaban.
Pour une chirurgie orthopédique à risque thromboembolique élevé autre que PTH, PTG, il n’y a pas de données suffisantes pour proposer l’aspirine comme moyen de prévention y compris pour la fracture de l’extrémité supérieure du fémur (FESF).

Nadia Rosencher - Anesthésiste-Réanimateur - Hôpital Cochin 75014 Paris.

Références
1. . Guidelines on perioperative venous thromboembolism prophylaxis.
Update 2011. Ann Fr Anesth Reanim. 2011 Dec;30(12):947-51
2. Eur J Anaesthesiol 2018; 35:134–138
3. Anderson et al. N Engl J Med 2018;378:699-707.