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The e-mémoires of the Académie Nationale de Chirurgie

Spécificités moléculaires des tumeurs urothéliales de la voie excrétrice urinaire supérieure

François AUDENET

Seance of wednesday 05 february 2020 (Communications libres)

DOI number : 10.26299/54y8-2m31/emem.2020.06.05

Abstract

Les tumeurs urothéliales de la vessie (TV) et de la voie excrétrice urinaire supérieure (TVES) ont le même aspect histologique. Alors que les TV représentent la majorité des tumeurs urothéliales (90-95 %), les TVES sont plus rares (5-10 %) et présentent des particularités épidémiologiques et cliniques. L’objectif de ce travail était de rechercher, par l’analyse des données de séquençage, les spécificités moléculaires des TVES.

Nous avons montré que l’analyse génétique des biopsies obtenues par urétéroscopie était techniquement faisable sur une plateforme de séquençage de nouvelle génération (MSKIMPACT) pour la majorité des patients (92 %) avec une bonne concordance entre les mutations identifiées sur la biopsie et la pièce de néphrourétérectomie.

Afin de rechercher des différences moléculaires entre TVES et TV, nous avons séquencé 649 échantillons tumoraux (195 TVES et 454 TV) comparés à l’ADN constitutionnel pour un panel de 275 à 468 gènes impliqués dans la carcinogenèse. Bien que le profil mutationnel soit similaire entre les 2 localisations, nous avons mis en évidence des différences significatives dans la prévalence de certaines mutations entre TVES et TV : les mutations de TP53, RB1 et ERBB2 étaient moins fréquentes dans les TVES (26 % vs 46 %, 3 % vs 20 %, 8 % vs 19 %, respectivement ; Q < 0,001) alors que FGFR3 et HRAS étaient plus fréquemment altérés par rapport aux TV (40 % vs 26 %, 12 % vs 4 %, respectivement ; Q < 0,001). Cela suggère une évolution tumorale différente entre les deux localisations, avec une proportion plus importante de TVES de bas grade évoluant vers des formes de haut grade.

Cependant, en cas de tumeurs urothéliales métachrones chez un patient donné, nous avons montré à partir d’une cohorte de 29 patients dont les tumeurs itératives ont été séquencées,
qu’il existait une origine clonale entre TVES et récidive vésicale dans la totalité des cas. Cela valide la théorie de la dissémination intraluminale avec implantation secondaire et montre la nécessité d’évaluer de nouvelles stratégies pour prévenir la greffe de cellules tumorales en périopératoire.

Enfin, le séquençage systématique des TVES peut permettre de détecter les tumeurs associées à un syndrome de Lynch, caractérisées par un phénotype associant une charge mutationnelle élevée, un score MSIsensor élevé, une signature mutationnelle MMR/MSI et une fréquence élevée de mutations FGFR3 R248C. L’identification d’un syndrome de Lynch a des
conséquences importantes pour le patient et ses apparentés en permettant le dépistage des autres tumeurs du spectre et en orientant le choix thérapeutique vers l’immunothérapie dans les maladies avancées.