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The e-mémoires of the Académie Nationale de Chirurgie

Discours de Jean Michel Blanquer pour la remise des insignes d'Officier de la Légion d'Honneur au Pr AC Benhamou

Albert Claude BENHAMOU

Abstract

Discours pour l’élévation au grade d’officier de la Légion d’Honneur de Monsieur Albert-Claude Benhamou

Madame la première dame, chère Brigitte,

Monsieur le professeur des universités, cher Albert-Claude,

Mesdames et messieurs,

Formé dans les hôpitaux de Paris, vous avez fait carrière en tant que chirurgien vasculaire. Vous êtes aussi un acteur institutionnel et associatif reconnu dans le domaine de la santé, de la formation et du développement des nouvelles technologies liées au numérique. Vous avez notamment contribué à mettre en place ces fameux robots de télé-présence pour les élèves malades en classe, j’y reviendrai.

On voit se dessiner à travers votre parcours le grand humaniste, dédiant sa vie à la science, au savoir et à la connaissance, ne « se piquant de rien », c’est-à-dire s’intéressant à tout, tel l’honnête homme du 16ème siècle reconverti en spécialiste de l’intelligence artificielle ! Car il y a vraiment chez vous quelque chose de très rabelaisien (Rabelais était médecin…), dans cette manière d’embrasser avec enthousiasme tous les domaines de l’« humaine connaissance » pour les mettre au service du bien commun.

Et parmi vos très nombreux domaines d’expertise et de compétence, je note un intérêt pour « ce qui fait lien » : des vaisseaux sanguins au tissu associatif, en passant par la toile numérique… Et « ce qui apporte du soin » : la médecine bien sûr, mais aussi l’engagement au service de l’intérêt général, les qualités humaines… Aussi en regardant votre parcours je ne puis m’empêcher de penser à ce beau livre de Maylis de Kerangal, Réparer les vivants, car au fond c’est ce que vous avez fait tout au long de votre vie.

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Vous commencez à l’hôpital, là où votre vocation de servir les autres est certainement née. En seulement 10 ans, le jeune interne devient chef de clinique en chirurgie vasculaire, s’il fallait une preuve de votre excellence professionnelle, la voici.

Ces qualités, vous décidez très tôt de les partager, en devenant maître de conférences puis professeur des universités praticien hospitalier à Tours puis Paris. Vous avez fait de la transmission des savoirs un fil conducteur de votre parcours, comme le démontre votre carrière professorale qui a pris fin il y a peu.

En parallèle de cette profession, vous avez grandement participé à la recherche universitaire à l’échelle nationale, mais aussi internationale. Vos travaux sur les techniques interventionnelles endovasculaires ont été déterminants et salués par tous. Vous êtes aussi l’initiateur du développement de la phlébologie, et l’on vous doit notamment le premier diplôme universitaire dans cette discipline.

Si votre carrière médicale est parfaitement remarquable, votre sens de l’engagement, votre énergie communicative et votre enthousiasme à mener jusqu’au bout les projets qui vous tiennent à cœur le sont tout autant.

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Dès 1993, vous êtes chargé de mission interministérielle de lutte contre les drogues et les toxicomanies. Sans vous limiter à vos fonctions, vous créez en parallèle l’Association médicale nationale d’aide aux enfants contre les drogues, ainsi que l’association de pharmaciens Croix verte et Ruban rouge contre le SIDA. Ces associations ont joué un rôle majeur en matière de prévention et d’action.

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Médecin engagé, vous êtes aussi visionnaire. C’est pourquoi dès le début des années 2000, vous saisissez très vite tout l’intérêt de développer les nouvelles technologies de la communication dans l’enseignement médical, puis dans l’enseignement supérieur en général.

Vingt ans plus tard, une pandémie d’un nouveau genre engendrait la fermeture des écoles et des universités, dont tous les jeunes, en particulier les étudiants ont beaucoup souffert. Sans aucun doute votre engagement d’alors a donné lieu à des travaux pionniers en la matière, qui auront prouvé leur utilité lors de la pandémie de COVID-19.

Le moment qui a constitué le point de départ de votre engagement en faveur du développement du numérique, c’est le colloque international « Internet et pédagogie médicale » de 2000, qui s’est tenu à la Pitié-Salpêtrière. Les années qui ont suivies ont vu l’émergence de l’université médicale virtuelle francophone, dont vous êtes le fondateur et le président jusqu’en 2012, et dont l’une des principales visées était de mettre à la disposition des établissements d’enseignement supérieur des ressources pédagogiques numériques.

La première Université numérique thématique (UNT) a été un tel succès que vous vous voyez confier une mission sur la mise en œuvre des universités numériques francophones, dossier sur lequel vous travaillez entre 2003 et 2007 et qui voit l’émergence de sept autres grandes UNT. Cette activité vous permet d’ajouter une nouvelle corde à votre arc, en devenant un acteur incontournable de la francophonie : vous avez été délégué ministériel entre 2009 et 2013 pour l’éducation numérique en Afrique, concepteur du programme Sankoré dont l’objectif était le développement de la francophonie numérique éducative.

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Evidemment, vous ne vous arrêtez pas là. Un esprit comme le vôtre ne s’arrête pas là. Vos travaux et vos engagements vous ont mené tout droit sur le chemin de l’innovation numérique au service de l’inclusion : ils se sont mêlés, confondus, influencés, et le projet TED-i dont je vais parler maintenant se situe en quelque sorte à la croisée de chacun des sillons que vous avez tracés.

Il y a trois ans, dans un service de cancérologie de la Ville de Lyon, deux jeunes vous interpellaient, chère Brigitte Macron. Ce qu’ils voulaient, c’était poursuivre leur scolarité en dépit de la maladie. Vous m’avez alors sollicité afin de trouver quelqu’un susceptible de prendre à bras le corps un tel sujet. Un homme de cette trempe, j’en connaissais un, Albert-Claude Benhamou, spécialiste des questions santé et numérique que j’avais connu alors qu’il était délégué interministériel sur l’Afrique.

C’est ainsi que je vous confiais une mission, cher Claude, qui a abouti à la publication d’un rapport d’une qualité remarquable, et qui a donné l’impulsion à ce fameux programme TED-i, pour « Travailler ensemble à distance et en interaction ». Ce programme permet aux élèves empêchés par la maladie de bénéficier d’une technologie de pointe, des systèmes de télé-présence robotisée, qui matérialisent la présence de l’élève et lui permettent de maintenir un lien direct avec ses enseignements, ses professeurs et ses camarades de classe. Ce programme se situe au cœur du principe de l’école inclusive que nous nous sommes attachés à défendre, collectivement, durant tout ce quinquennat. Il en est même l’aboutissement, il allie l’innovation, l’ambition, l’engagement : ces principes qui vous caractérisent, qui vous animent.

Cher Albert-Claude, vous croyez dans l’innovation salvatrice, la technologie à l’échelle humaine, les sciences et les techniques mises au service du progrès social, et ce projet en est la parfaite illustration. Dans un monde toujours plus numérique, il faut toujours plus d’humain : je sais que vous partagez cette conviction. C’est le sens du projet TED-i, qui s’inscrit dans la vision que nous avons de l’humanisme du XXIème siècle, fidèle aux valeurs universalistes et à l’esprit des Lumières, tout en étant délibérément tourné vers l’avenir.

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Monsieur le professeur, lors de la Journée académique de l’innovation qui s’est tenue au lycée Gustave Eiffel en 2020, vous avez dit : « L’école est un médicament pour [les enfants], c’est un réel soutien moral de pouvoir permettre à l’élève de participer à la classe et de revoir ses camarades ».

Je vous remercie pour ces mots. Et je vous remercie d’avoir été au chevet des enfants malades, en contribuant par vos soins à développer cette pharmacopée de l’Ecole de la République dont ils bénéficient désormais.

Grâce à vous, ils peuvent continuer à maintenir le lien avec l’école malgré les maladies graves dont ils sont atteints. Ces sourires sur leurs visages, sur ceux de leurs parents, de leurs enseignants, ou de leurs camarades, existent grâce à vous. Grâce votre sens de l’intérêt général, à vos qualités humaines, à votre foi dans l’Homme, le progrès et l’innovation. Grâce à une vie d’engagement, la vôtre.

Monsieur Albert Claude Benhamou, au nom des pouvoirs qui me sont conférés par le Président de la République, je vous fais Officier dans l’Ordre de la Légion d’honneur.