Le point sur la cure chirurgicale du spina bifida in utero
Seance of wednesday 20 april 2016 (EVOLUTION DU DEVELOPPEMENT PROFESSIONNEL CONTINU (DPC) et CHIRURGIE PÉRINATALE)
Abstract
La myéloméningocèle (MMC) représente une extériorisation à la peau de la moelle et des racines par défaut de fermeture du tube neural. Elle représente l’une des malformations du système nerveux central la plus fréquente avec une incidence variant de 1/500 à 1/2000 naissances selon les zones géographiques. Elle est associée à une ouverture anormale des arcs postérieurs vertébraux (spina bifida), le plus souvent au niveau lombo-sacré. Le taux de dépistage prénatal de cette anomalie par échographie est supérieur à 90%3. Compte tenu du handicap lourd qui est associé à cette malformation, une grande majorité des couples choisissent l'interruption médicale de la grossesse après information prénatale.L'histoire naturelle de cette malformation est connue avec la constitution progressive de lésions définitives des structures nerveuses extériorisées responsable d'un tableau de paralysie des membres inférieurs et de troubles du contrôle des sphincters4. De plus, la fuite de liquide céphalo-rachidien (LCR) au niveau du défect conduit à des modifications des structures cérébrales telles que l'engagement du cervelet au niveau cérébral réalisant l'anomalie d'Arnold-Chiari de type II qui est présente chez la majorité des nouveau-nés, des phénomènes de déformation du tronc cérébral, et l'apparition d'une hydrocéphalie secondaire à un obstacle à la libre circulation du LCR au niveau cérébral.Une réparation chirurgicale de cette malformation chez le fœtus est susceptible de modifier cette séquence aggravatrice prénatale. Suivant les développements de ces techniques de réparation prénatale des MMC dans les 15 dernières années, un essai américain a démontré le bénéfice de la chirurgie fœtale de réparation des MMC avec, à l'âge de 30 mois, une réduction des conséquences cérébrales de l'anomalie et une amélioration du score mental et moteur des enfants opérés in utero à l'âge de 30 mois, par rapport aux enfants opérés en période néonatale immédiate. Il s'agit pour l'instant d'une technique réalisée "à ciel ouvert" et donc nécessitant la réalisation d'une hystérotomie. Ces résultats très encourageants sont pourtant à nuancer du fait des complications materno-fœtales possibles de cette intervention (accouchements prématurés, ruptures prématurées des membranes, oligoamnios, déhiscence de la cicatrice d’hystérotomie, œdèmes aigus du poumon liés au traitement tocolytique).Le bénéfice attendu pour les fœtus présentant cette malformation nous a conduits à mettre en place l'étude PRIUM (Programme de Réparation In Utero des Myéloméningocèles) afin d'introduire cette technique en France et de la proposer aux couples ne souhaitant pas recourir à une IMG après diagnostic prénatal de MMC.À ce jour 45 patientes ont été reçues en consultation pour complément d'information sur le protocole. Neuf patientes présentaient des critères exclusion. Le diagnostic du type de dysraphisme a été redressé dans 8 cas. Finalement sur les 28 patientes "éligibles", trois ont opté pour une chirurgie prénatale, cinq pour une réparation postnatale et finalement 20 patientes ont opté pour une interruption médicale de la grossesse.Pour les 3 cas où une chirurgie fœtale a été pratiquée, le terme lors de la réparation était compris entre 21 SA + 4 jours et 25 SA + 5 jours. Aucune complication maternelle ou fœtale n'a été observée. Le terme de naissance a été compris entre 33 SA+2j et 36 SA avec une évolution néonatale satisfaisante. Dans les trois cas, il a été observé une correction de l'anomalie d'Arnold-Chiari dans les 15 jours suivant la réparation. Aucun de ces enfants n'a nécessité de dérivation ventriculo-péritonéale en post natal.L'analyse des 24 premiers mois suivant la mise en place de l'étude PRIUM a permis de confirmer que cette offre de soin en France était justifiée par l'existence d'une demande de certains couples de pouvoir bénéficier de cette prise en charge suivant un diagnostic prénatal de myéloméningocèle lombo-sacrée. Nous avons globalement observé que cette demande concernait environ 14% des couples potentiellement éligibles à une chirurgie fœtale de réparation, qui, après un premier temps d'information sur le pronostic de la malformation, n'avaient pas opté pour la réalisation d'une interruption médicale de la grossesse. Il sera bien sur capital d'étudier le devenir de ces enfants ayant bénéficié d'une réparation prénatale. Parallèlement, le développement de techniques de réparation "à utérus fermé", par technique foetoscopique, doit être poursuivi. Cette approche pourrait permettre de réduire encore les risques maternels associés à cette réparation. Cependant, les résultats actuels de ces techniques moins invasives demeurent insuffisants principalement du fait d'un taux encore trop élevé de rupture prématuré des membranes et d'accouchement prématuré.(Service de Médecine Fœtale, Hôpital Armand Trousseau - APHP, Paris 6)Commentateur : Jean-Félix DUBOUSSET (Paris)