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The e-mémoires of the Académie Nationale de Chirurgie

Le Trauma Damage Control « Viscéral » dans les urgences vitales

PONS F | HORNEZ E | GONZALEZ F | MOCELLIN N

Seance of wednesday 12 december 2012 (SEANCE COMMUNE AVEC LA SOFCOT : LE TRAUMA DAMAGE CONTROL)

Abstract

A l’ origine le terme de « damage control » est un terme de la marine de guerre des Etats Unis désignant le protocole de prise en charge d’un bâtiment ayant subi des avaries au combat. Cette prise en charge se fait en trois temps : 1 : réparation des avaries les plus graves : éteindre les feux et colmater les brèches, 2 : maintenir le bâtiment à flot jusqu’au port , 3 : une fois au port et en sécurité débuter les réparations définitives.A la fin des années 80 a été développée dans les Trauma Center US une tactique de prise en charge des blessés hémorragiques graves reposant sur le constat que chez ces blessés la mort survenait quasi inéluctablement une fois qu’avait débuté la « triade létale » faite de l’hypothermie, des troubles de coagulation et de l’acidose provoquées par l’hémorragie et se potentialisant mutuellement. Pour prévenir l’apparition de cette triade a été définie une prise en charge en trois temps : 1 : un premier temps chirurgical le plus rapide possible (une heure) visant uniquement à faire l’hémostase (éteindre les feux) et à contrôler les fuites des organes creux (colmater les brèches) sans faire de geste de réparation 2 : un deuxième temps qui est un temps de réanimation visant à corriger les différents désordres (réchauffer le patient, corriger les troubles de la coagulation en particulier par des transfusions, corriger l’acidose),3 : un troisième temps qui est le deuxième temps chirurgical débuté lorsque les constantes sont jugées satisfaisantes (en général entre 24 et 72 heures après le premier geste). Au cours de ce temps sont réalisés ou débutés les gestes définitifs de réparation qui peuvent parfois (souvent) être itératifs. En 1993 Rotondo, par analogie avec la prise en charge des bâtiments a donné à cette tactique le nom de « damage control » Cette tactique initialement décrite pour les traumatismes hémorragiques de l’abdomen a été élargie progressivement à toutes les lésions hémorragiques graves et en particulier chez les polytraumatisés et polyblessés. On a ainsi décrit un « damage control » orthopédique , vasculaire, neurochirurgical et même thoracique. Cette tactique a prouvé son efficacité en diminuant la mortalité de ces traumatismes très graves et est devenue la règle pour ce type de traumatisme. Initialement les termes de abreviated ou staged laparotomy ont été proposés en anglais et « laparotomie écourtée » en français. Ils ne correspondent pas totalement au concept car ils le limitent aux seuls traumatismes de l’abdomen. D’autres termes ont été utilisés tels que « bailout surgery » (chirurgie de sauvetage), planned reoperation (réintervention programmée). Le terme de « damage control » est maintenant international et consacré par l’usage.Au plan technique le Damage Control en chirurgie « viscérale » impose un certain nombre de règles.Lors du premier temps chirurgical : l’ensemble des gestes ne doit pas dépasser 60 à 90 mn avant le retour en réanimation : le chirurgien doit être rapide non seulement pour faire l’hémostase mais aussi pour terminer l’intervention sans chercher à tout réparer -les gestes en chirurgie viscérale sont : - packing pour les traumatismes du foie, splénectomie pour ceux de la rate, néphrectomie pour les lésions hémorragiques du rein (pour lesquels le packing est rarement efficace) …- fermeture des brèches digestives sans réparation ni stomie (suture ou agrafage)- pas de drainage (sauf le cas particulier des lésions pancréatiques)- abdomen systématiquement laissé ouvert avec un procédé type pansement à pression négative-les gestes en chirurgie vasculaire sont : contrôle et mise en place de shunt associée éventuellement à des fasciotomies-les gestes en chirurgie thoracique sont plus rares compte tenu de la nécessité d’un geste d’hémostase complet d’emblée ; néanmoins des techniques de tractotomies, packing de lésions pariétales, torsion du hile du poumon, thorax laissé ouvert ont été décrites.Lors du deuxième temps chirurgical (12 à 72h après) en fonction des lésions et de l’état du blessé il faut assurer la réparation des différentes lésions - une hémostase complémentaire éventuelle,- la réparation des lésions du grêle- le traitement (encore débattu) des lésions coliques : stomie ou anastomose différée?- la fermeture de l’abdomen dès que possible- la réparation de lésions vasculaires (ou thoraciques)…